Sanctifier son dimanche en confinement II

Chers amis,

Deuxième dimanche du deuxième confinement, XXXIII ème du Temps ordinaire. Autant de chiffres qu’il nous faut garder pour ne pas rentrer dans un temps inexistant, dans une routine sans la messe qui nous mènerait aussi sûrement vers la mort spirituelle que l’automne monotone nous mène vers l’hiver. De même que nous vivons ce temps liturgique comme une veille active tendue vers le Christ, vivons ces dimanches où la messe nous est défendue comme un décompte vers la joie de nos retrouvailles futures.

« Il faut s’habituer à… », « il faut s’attendre à… » tente de nous chanter les innombrables sirventes politiques ou médiatiques qui monopolisent les ondes ; mais tout comme Noël est la fête de la naissance du Christ et ne saurait être repoussée en été, ainsi nous ne pourrons jamais nous habituer à être privé du sacrement de l’Eucharistie, sans abandonner ainsi toute identité catholique.

Mais comme l’évangile nous invite à être patients et actifs, voici quelques propositions (dont certaines habituelles !) pour bien vivre ce dimanche 15 novembre en le donnant au Seigneur ! Une occasion de faire fructifier ce jour de repos que nous Lui devons ! A noter qu’à partir de cette semaine, une prière universelle pour le temps de prière sera écrite par un paroissien différent chaque dimanche, pour augmenter notre communion.

1-Prévoir soigneusement les horaires de la journée et les activités qui la composeront, en particulier le temps (au moins une heure) accordé exclusivement à Dieu.

2-Aménager (ou améliorer) un coin chez soi pour vivre ce temps.

3- « S’endimancher », c’est-à-dire préparer par le soin donner aux habits, aux repas, un temps différent de celui du reste de la semaine.

4- Si l’on vit en couple ou en famille, prendre un temps pour établir une liste de tous les talents que nous reconnaissons chez ceux qui partagent avec nous ce confinement. Les écrire, éventuellement en décorant joliment cette liste.

5- Pendant le temps de prière prévu le dimanche, après avoir écouté l’évangile et avoir échangé dessus (éventuellement à l’aide de l’homélie écrite),  offrir cette liste à chacun ; en rendant grâce à Dieu pour ceux-ci. Éventuellement, pour les parents, prendre un temps supplémentaire pour voir comment permettre à leurs enfants de s’épanouir dans leurs talents.

6- Si l’on a l’occasion de faire une balade (notamment familiale), faire un beau bouquet automnale pour décorer le coin prière. On peut aussi commencer à réunir les éléments nécessaires pour fabriquer une couronne de l’Avent dans deux semaines.

6 bis – Cuisine : En toutes saisons, déguster les ravioles ! https://www.vin-gastronomie-drome.com/la-bonne-recette-pour-deguster-les-ravioles/

7- En musique, cette semaine, une autre cantate de Bach qui n’a pas été composée pour cet évangile mais pour la Visitation. Cependant le thème central, le fameux « Jésus que ma joie demeure », peut illustrer cette belle parole de l’évangile : »Serviteur bon et fidèle, entre dans la joie de Ton Maître ».

https://www.youtube.com/watch?v=wHYithGyz1M

8- Prendre des nouvelles des paroissiens, surtout les plus isolés, ou les plus fragiles.

9- Découvrir un artiste contemporain, Andreï Mironov, à qui nous devons l’œuvre d’illustration de l’Évangile de cette semaine. Ce peintre et iconographe russe, né en 1975, marqué par la guerre et la violence, a trouvé dans son art Celui qui manquait à sa vie : le Christ.

10 – En ce mois de prière pour les défunts, pour les âmes du Purgatoire, découvrons le Sanctuaire de Montligeon.

https://www.youtube.com/watch?v=S4L2LKcQNHo&feature=emb_title

 

Et voici l’homélie !!

 

Homélie pour le XXXIIIème dimanche du Temps Ordinaire

 

 

Chers frères et sœurs,

 

 

En cet avant-dernier dimanche de cette année liturgique, l’évangile que nous lisons est la fameuse parabole des talents. Savez-vous que, si le mot « talent » dans l’évangile fait référence à une unité de masse (ici monétaire) de l’époque, il a reçu son sens actuel de « capacité d’un individu à exceller dans un domaine particulier » de cet évangile, justement ? Cela montre l’empreinte fondamentale du christianisme dans notre culture et notre langue (ainsi que beaucoup d’autres), et contribue à rendre évident les racines chrétiennes de notre continent.

 

Si ce terme est passé à postérité, la compréhension de ce texte n’est pourtant pas aussi aisée qu’on le pense, et sujet à de nombreux contre-sens, ou à une lecture biaisée, partielle de son contenu. Certains y voit la naissance d’un esprit capitaliste, d’autre une preuve de la perversité de Dieu, de son injustice. Autant de conclusions qui nous renvoient, comme le texte lui-même, aux conséquences du péché originel, nous le verront plus tard.

 

Replaçons d’abord cette parabole dans son contexte : il est le centre du chapitre 25 de l’évangile selon St Matthieu qui comporte deux autres paraboles : celle des dix vierges entendue la semaine dernière, et celle du Jugement qui sera proclamé dimanche prochain. Ce chapitre, comme nous l’avons vu la semaine dernière, est le dernier avant le récit de la Passion du Seigneur et comporte donc un enseignement fondamental. En ce dimanche, cette parabole est précédée d’un texte du livre des Proverbes qui fait l’éloge de la femme parfaite, du psaume 127 qui le prolonge, et enfin en deuxième lecture d’un appel à la vigilance bien familier maintenant depuis la semaine dernière de la part de Saint Paul dans sa lettre aux habitants de Thessalonique.

 

Riches de tout cela, tâchons de comprendre un peu plus cette parabole.

 

La Parole de Dieu de ce dimanche – l’avant-dernier de l’année liturgique donc – nous invite à être vigilants et actifs dans l’attente du retour du Seigneur Jésus à la fin des temps. Si la vigilance avait été le thème dominant de dimanche passé, avec ses conséquences dans l’attente de la venue du Seigneur, celui-ci est augmenté par un souci d’action dans le temps qui nous est ainsi donné. Le « talent » était donc une ancienne monnaie romaine, de grande valeur, et comme nous l’avons dit c’est justement à cause de la popularité de cette parabole que celle-ci est devenue synonyme de talents personnels, que chacun est appelé à faire fructifier.

En réalité, le texte parle d’un « homme, qui partait en voyage » et qui « appela ses serviteurs et leur confia ses biens » (Mt 25, 14). L’homme de la parabole représente le Christ lui-même, les serviteurs sont les disciples et les talents sont les dons que Jésus leur confie. Par conséquent, ces talents ne représentent pas seulement les qualités naturelles mais aussi les richesses que le Seigneur Jésus nous a laissées en héritage, afin que nous les fassions fructifier : sa Parole, déposée dans le saint Évangile ; le Baptême, qui nous renouvelle dans l’Esprit Saint ; la prière (le « Notre Père ») que nous élevons à Dieu en tant que fils unis dans le Fils ; son pardon, qu’il a commandé de porter à tous ; le sacrement de son Corps immolé et de son Sang versé. En un mot : le Royaume de Dieu, qu’Il est Lui-même, présent et vivant au milieu de nous.

 

C’est le trésor que Jésus a confié à ses amis, les Apôtres, au terme de sa brève existence terrestre. La parabole de ce jour insiste sur l’attitude intérieure avec laquelle il faut accueillir et valoriser ce don. L’attitude qu’il ne faut pas avoir est celle de la peur : le serviteur qui a peur de son patron et craint son retour cache la pièce de monnaie sous terre et celle-ci ne produit aucun fruit. Cela arrive par exemple à celui qui a reçu le Baptême, la Communion, la Confirmation, mais ensevelit ensuite ces dons sous une couche de préjugés, sous une fausse image de Dieu qui paralyse la foi et les œuvres. Ceci fait qu’il trahit les attentes du Seigneur.

Lorsque le serviteur dit dans l’évangile « J’ai eu peur, et je suis allé cacher ton talent dans la terre », j’entends raisonner la parole d’Adam, dans le chapitre 3 du livre de la Genèse, juste après avoir péché alors que Dieu le recherche : « J’ai entendu ta voix dans le jardin, j’ai pris peur parce que je suis nu, et je me suis caché. » Le moteur principal de la tiédeur des chrétiens, de leur manque de charité authentique, d’une faible vie de prière provient des conséquences du péché qui fausse l’image véritable de Dieu. Si l’Homme a peur de Dieu, comment peut-il vraiment l’aimer, et ainsi aimer réellement son prochain, en portant du fruit ? Comment même peut-il évangéliser, c’est-à-dire annoncer aux autres que Dieu les aime, qu’Il les recherche ? Renonçant alors au témoignage, il enfouit sous la terre de son humanité l’étincelle de lumière divine confiée par Dieu pour enflammer le monde de Son amour.

 

Mais la parabole souligne davantage les bons fruits portés par les disciples qui, heureux du don reçu, ne l’ont pas tenu caché jalousement et par peur, mais l’ont fait fructifier en le partageant. Oui, ce que le Christ nous a donné se multiplie en le donnant ! C’est un trésor fait pour être dépensé, investi, partagé avec tous, comme nous l’enseigne ce grand administrateur des talents de Jésus qu’est l’apôtre Paul. Plus encore, comme dans la dimension nuptiale dimanche dernier, la perspective est d’entrer dans la joie du Maître, c’est-à-dire la vie éternelle !

 

Une autre incidence de cette parabole est un état d’esprit face aux défis de la vie, dans sa dimension économique notamment. L’enseignement évangélique que nous offre aujourd’hui la liturgie a en effet eu une influence au niveau historique et social en encourageant parmi les populations chrétiennes une mentalité active et entreprenante. Mais le message central porte sur l’esprit de responsabilité avec lequel il faut accueillir le Royaume de Dieu :  une responsabilité envers Dieu et envers l’humanité. Avant même l’encyclique Laudato Si, le précieux compendium de la Doctrine Sociale de l’Église notait, au numéro 326 : « À la lumière de la Révélation, l’activité économique doit être considérée et accomplie comme une réponse reconnaissante à la vocation que Dieu réserve à chaque homme. Celui-ci est placé dans le jardin pour le cultiver et le garder, en en usant selon des limites bien précises (cf. Gn 2, 16-17) dans l’engagement à le perfectionner (cf. Gn 1, 26-30; 2, 15-16; Sg 9, 2-3). En se faisant témoin de la grandeur et de la bonté du Créateur, l’homme marche vers la plénitude de la liberté à laquelle Dieu l’appelle. Une bonne administration des dons reçus, notamment des dons matériels, est une œuvre de justice envers soi-même et envers les autres hommes : ce que l’on reçoit doit être bien utilisé, conservé, fructifié, comme l’enseigne la parabole des talents (cf. Mt 25, 14-30; Lc 19, 12-27).

 

L’activité économique et le progrès matériel doivent être mis au service de l’homme et de la société; si l’on s’y consacre avec la foi, l’espérance et la charité des disciples du Christ, l’économie et le progrès peuvent aussi être transformés en lieux de salut et de sanctification; dans ces domaines aussi il est possible d’exprimer un amour et une solidarité plus qu’humains et de contribuer à la croissance d’une humanité nouvelle, qui préfigure le monde des temps derniers.683 Jésus résume toute la Révélation en demandant au croyant de s’enrichir en vue de Dieu (cf. Lc 12, 21): l’économie aussi est utile pour ce faire quand elle ne trahit pas sa fonction d’instrument au service de la croissance globale de l’homme et de la société et au service de la qualité humaine de la vie. »

 

Cette parabole des talents doit aussi éclairer le chrétien non seulement dans les dimensions de sa vie spirituelle et le développement de la Grâce qu’il a reçut gratuitement à son baptême, en suivant les vertus théologales (Foi, Espérance et Charité), mais aussi dans la conduite de sa vie terrestre, dans sa participation à l’activité économique et politique, par la pratique des vertus cardinales (prudence, tempérance, force d’âme et justice).

 

Ce message sur notre responsabilité envers Dieu et l’humanité, qui attendent chacun la mise en valeur de la grâce que nous avons reçue, chacun, par l’action de notre génie personnel s’incarne parfaitement l’attitude du cœur de la Vierge Marie qui, en recevant le don le plus précieux de tous, Jésus lui-même, l’a offert au monde avec un immense amour. Nous Lui demandons de nous aider à être des « serviteurs bons et fidèles« , afin de pouvoir prendre un jour part « à la joie de notre Seigneur« .

 

Et voici la Prière Universelle !

« Tu te nourriras du travail de tes mains : Heureux es-tu ! À toi, le bonheur ! »
Pour que le travail ne soit plus asservissement mais accomplissement dans l’amour. Pour que
l’homme contemporain ait à cœur de réfléchir et purifier son rapport à la machine, pour retrouver
la liberté, le sens, et la gratitude envers ta sainte Providence,
Seigneur, nous te prions.

« Ta femme sera dans ta maison comme une vigne généreuse »
Pour que chaque femme et chaque homme de ce monde sache discerner avec amour et paix la
place à laquelle Tu l’appelles, et soit la flamme vive de son foyer, afin qu’advienne la civilisation
de l’Amour,
Seigneur, nous te prions.

« Tes fils seront, autour de la table, comme des plants d’olivier. »
Pour que l’enfance et la jeunesse d’aujourd’hui se lèvent pour s’affranchir des chaînes de
l’ignorance et de l’individualisme et s’enraciner en Toi, discernant que Tu es l’unique nécessaire.
Pour que nos fils et nos filles soient des artisans de paix et fasse la joie du Père,
Seigneur, nous te prions

« Ne restons pas endormis comme les autres, mais soyons vigilants et restons sobres. »
Pour notre monde, étourdi de bien-être, d’argent et de rapidité, qu’il se réveille et que les
hommes et les femmes de bonne volonté deviennent des sentinelles de plus en plus
nombreuses, à l’esprit lucide, à la conscience aiguisée et aux entrailles miséricordieuses, afin de
t’honorer maintenant et à l’heure de ton retour,
Seigneur, nous te prions.

« Tu as été fidèle pour peu de choses, je t’en confierai beaucoup ; entre dans la joie de ton seigneur. »
Pour ton Eglise, qu’elle demeure fidèle et sage dans l’adversité, et rende témoignage avec un
amour brûlant et une juste exigence de vérité, de la joie de t’appartenir. Que nous soyons dignes
de ta confiance et de ton amour, Toi qui a tant besoin de nous pour que ton Règne vienne,
Seigneur, nous te prions.

 

Enfin, si la liberté de culte, pourtant toujours fondamentale comme l’a rappelé notre 1er Ministre récemment, est bizarrement suspendue, celle de manifester est elle maintenue. Des laïcs organisent donc dans tous le pays des manifestations déclarées et autorisées ce dimanche un peu partout en France. A Valence, c’est à 15h30 devant la cathédrale.