Sanctifier son dimanche en confinement

Chers paroissiens,

Nous voilà reparti pour un confinement, même si celui-ci est, à bien des égards, différents du précédent. C’est à peu le « drôle de confinement », puisque personne ne l’est vraiment, sauf pour ce qui donne le sens de notre vie : le culte public à Dieu, les fêtes de familles, la culture… J’espère vraiment que ce jour donnera une bonne nouvelle en ce qui concerne les messes, prions pour le Conseil d’État ! Pour ma part, je continue de vous porter dans la prière ; et en particulier pendant la messe je que continue de célébrer pour toute la paroisse.

Voici une homélie (cf à la fin), et quelques petites idées pour sanctifier le dimanche.

1-Prévoir soigneusement les horaires de la journée et les activités qui la composeront, en particulier le temps (au moins une heure) accordé exclusivement à Dieu.

2-Aménager un coin chez soi pour vivre ce temps.

3- « S’endimancher », c’est-à-dire préparer par le soin donner aux habits, aux repas, un temps différent de celui du reste de la semaine.

4- Fabriquer une lampe à huile pour se préparer à la lecture de l’Évangile. Avec les enfants, c’est un bon moyen de préparer ce temps et le lieu de la prière. Un exemple dans la vidéo si dessous (ps : on peut aussi fabriquer soi même la mèche flottante avec un vieux bout de lacet rond bien imbibé et une punaise ; ou bien un bout de liège et une ficelle trempée dans un peu de cire de bougie fondue…)

Fabriquer une lampe à l’huile naturelle

5- Si l’on vit en famille, prendre le temps de se réunir pour prier : se rassembler dans le coin préparé pour, allumer la lampe ou une bougie, prendre un temps de silence, chanter ensemble (cf plus-bas), lire et partager au moins sur l’évangile, parler de la foi dans le retour du Christ et de l’attente de sa venue…

6- Dans la journée on peut aussi découvrir, ou redécouvrir cette magnifique cantate de Johann Sebastian Bach, composée pour illustrer cet évangile. A l’époque, la cantate était écoutée en silence par l’assemblée, qui suivait avec un livret, entre les lectures et l’homélie.

7- Prendre des nouvelles des paroissiens, surtout les plus isolés, ou les plus fragiles.

8- Normalement le 8 novembre c’est la Toussaint du diocèse, c’est-à-dire que nous fêtons les saints drômois. L’occasion de les découvrir ici : https://valence.cef.fr/histoire-et-saints-du-diocese/

9- Se réjouir avec cette très belle vidéo de peinture d’art sacrée contemporain qui nous montre combien la beauté élève l’Homme !

10- Cuisine : un bon plat automnale 100% drômois pour le déjeuner du dimanche ! https://www.vin-gastronomie-drome.com/pintadeau-de-la-drome-ecrasee-de-pommes-de-terre-aux-noix-et-butternut/

PS: si certains aiment suivre la messe en direct, je vous invite à voir celle de nos voisins du crestois : https://crestois.catholique.fr/saint-sauveur/?fbclid=IwAR293yUpbNLWH2SGu0IWBtvklTVAu81MCNFn5z7q4NgkqKW1oZUmWd7fcxg

 

Et voici l’homélie !

HOMÉLIE XXIIème Dimanche du Temps ordinaire – Dimanche 8 novembre 2020

 

 

 

Frères et sœurs,

 

A la suite de la fête de la Toussaint, dimanche dernier, nous commençons ce magnifique chemin spirituel vers la fête du Christ Roi de l’Univers, final de notre année liturgique. Cet itinéraire que nous allons probablement devoir vivre séparés les uns des autres par une législation injuste doit nous permettre de lever notre regard des innombrables soucis de la vie quotidienne et de le poser vers le but ultime, la rencontre avec Dieu.

 

Les lectures bibliques de la liturgie de ce dimanche nous invitent en effet à prolonger la réflexion sur la vie éternelle, commencée à l’occasion de la commémoration de tous les fidèles défunts, lundi dernier.

 

Sur ce point, la différence est claire entre celui qui croit et celui qui ne croit pas, ou, pourrait-on également dire, entre celui qui espère et celui qui n’espère pas. Dans la deuxième lecture, saint Paul l’écrit en effet aux Thessaloniciens : « Nous ne voulons pas vous laisser dans l’ignorance au sujet de ceux qui se sont endormis dans la mort ; il ne faut pas que vous soyez abattus comme les autres, qui n’ont pas d’espérance » (1 Th 4, 13). La foi dans la mort et la résurrection de Jésus Christ marque, également dans ce domaine, une ligne de partage décisive. Saint Paul le rappelle encore aux chrétiens d’Éphèse qui, avant d’accueillir la Bonne Nouvelle, étaient « sans espérance et sans Dieu dans le monde » (Ep 2, 12). En effet, la religion des Grecs, les cultes et les mythes païens, n’étaient pas en mesure de faire la lumière sur le mystère de la mort, si bien qu’une inscription antique disait : « In nihil ab nihilo quam cito recidimus », ce qui signifie : « Du rien au rien, combien rapidement nous retombons ». Si nous supprimons Dieu, si nous supprimons le Christ, le monde sombre dans le vide et dans l’obscurité. C’est ce qui se manifeste dans l’expression du nihilisme contemporain, un nihilisme souvent inconscient qui contamine malheureusement tant de personnes. J’en vois personnellement, d’ailleurs, une trace dans la panique irraisonnée qui s’empare de notre monde en ce temps d’épidémie, où la peur de la mort domine sur la volonté de vivre. Loin est le temps du « la liberté ou la mort », et aujourd’hui nous préférons sacrifier l’un dans l’espoir forcément déçu d’éviter l’autre !

Pour en revenir à l’Évangile d’aujourd’hui, nous retrouvons une parabole célèbre, qui parle de dix jeunes filles invitées à un festin de noces, symbole du royaume des cieux, de la vie éternelle (Mt 25,1-13). Benoit XVI la commente ainsi : « C’est une image de joie, par laquelle Jésus enseigne une vérité qui nous remet en question. En effet, parmi ces dix jeunes filles, cinq vont à la fête, parce qu’à l’arrivée de l’époux, elles ont de l’huile pour allumer leurs lampes, alors que les cinq autres restent dehors, parce que, imprudentes, elles n’ont pas apporté d’huile. Que représente cette « huile », indispensable pour être admis au banquet nuptial ? Saint Augustin (cf. Discours 93, 4) et d’autres auteurs anciens y lisent un symbole de l’amour, qui ne peut pas être acheté, mais se reçoit comme un don, se conserve dans le cœur et se pratique par les œuvres. La vraie sagesse est de tirer profit de la vie mortelle pour accomplir des œuvres de miséricorde, car, après la mort, ce ne sera plus possible. Lorsque nous serons ressuscités pour le jugement dernier, celui-ci se fera sur la base de l’amour pratiqué durant la vie terrestre (cf. Mt 25, 31-46). Et cet amour est un don du Christ, diffusé en nous par l’Esprit Saint. Celui qui croit dans le Dieu-Amour porte en lui une espérance invincible, comme une lampe avec laquelle traverser la nuit au-delà de la mort, et parvenir à la grande fête de la vie. »

 

Une fois cette image ainsi commentée, elle nous redevient familière ; essayons d’aller plus loin et d’en apercevoir les détails : Elles sont dix ; elles sont vierges ; elles tiennent une lampe à huile à la main. Autant de touches symboliques qui nous aident à brosser un tableau du Royaume. Mais en fait, les jeunes filles ne sont qu’un élément de la parabole ; l’ensemble de l’histoire nous apprend qu’il en est du Royaume des cieux comme d’une noce. La parabole ne fait que dévoiler un trait particulier du Royaume, à savoir l’attente de l’Église. Les jeunes filles symbolisent la communauté chrétienne. Ces jeunes filles portent des lampes, sans doute des torches imbibées d’huile pour danser aux noces de l’époux, selon les coutumes de l’époque. Dans le judaïsme, l’huile symbolise certes les bonnes œuvres, mais aussi la joie de l’accueil. Enfin, le chiffre dix est, dans le langage biblique, le chiffre symbolique de l’action humaine (car nous avons dix doigts). L’Époux vient dans le quotidien de la vie auprès d’hommes qui sont aux champs (Mt 24, 40) et de femmes qui s’activent à la meule (v. 41) …

 

Cinq des jeunes filles sont prévoyantes, les cinq autres sont insensées. La traduction de ces deux adjectifs est difficile, mais pleine d’enseignements. La Bible qualifie de prévoyant ou d’avisé l’homme ouvert au mystère de Dieu, alors que l’insensé se dit de l’impie qui s’oppose à la loi divine et va jusqu’à dire dans son cœur : « Il n’y a pas de Dieu » (Ps 14, 1).

Ce n’est pas la première fois que saint Matthieu utilise ces qualificatifs. Il appelle « prévoyant » l’homme qui bâtit sa maison sur le roc, tandis que celui qui construit sur le sable n’est qu’un homme stupide (Mt 7, 24). La parabole divise donc la communauté chrétienne en sages et en sots : il y a ceux qui font la volonté du Père et ceux qui n’en font qu’à leur tête. L’idée première de la parabole est que Jésus reconnaîtra pour siens ceux qui auront fait la volonté de son Père. L’obéissance à la volonté du Père constitue, aux yeux de Matthieu, l’essentiel de l’enseignement de Jésus. Nous le vérifions dès le chapitre suivant de cet évangile, le 26ème, où est concentré l’ensemble du récit de la passion, avec au milieu de celui-ci le verset 42 : « De nouveau, il s’éloigna et pria, pour la deuxième fois ; il disait : « Mon Père, si cette coupe ne peut passer sans que je la boive, que ta volonté soit faite ! »  Le thème de la vigilance que nous voyons souvent, au premier regard, comme fondamental prend, dès lors, une coloration bien spécifique : une simple remarque de bon sens permet de dire que le thème de la vigilance est secondaire, car ce sont bien toutes les dix jeunes filles qui se sont endormies !

 

Sous peine de sombrer dans le moralisme, il faut cependant revenir aux symboles. Le signe de l’huile est particulièrement évocateur à ce propos. S’il envoie à la joie de l’accueil, il mesure en fait la qualité de l’amour de celles qui veillent. Il est significatif que les vierges insensées doivent recourir aux marchands pour renouveler leur provision d’huile. L’amour avec lequel elles accueillent l’Époux vient en droite ligne d’une … boutique ! Révélatrice aussi est l’incapacité de leurs compagnes sensées à partager leur huile : c’est qu’on ne peut être vigilant à la place d’un autre, quand il s’agit du cœur.

 

Mais l’essentiel est évidemment la venue de l’Époux. C’est alors que se révèle le comportement d’une communauté pendant le temps de l’attente, ce qui est très exactement ce que ce mois liturgique veut nous faire travailler : attendons-nous vraiment la rencontre avec le Christ ? Espérons-nous le retour du Christ, travaillons-nous à Son règne ? Certes, le Christ vient, mais la rencontre entre Dieu et l’homme se vit toujours dans une alliance d’amour.

 

Enfin, pour finir ce tableau, il faut relever le fait que l’Époux vient au milieu de la nuit. Le thème est fréquent dans le Nouveau Testament, en faisant écho à une espérance attestée dans le Targum palestinien (un célèbre écrit rabbinique). L’auteur y évoque les quatre nuits fondamentales de l’histoire des hommes : celle où Dieu créa le monde, celle où Abraham offrit son fils en holocauste, celle de la Pâque où le peuple sortit d’Égypte, la quatrième enfin qui est celle des temps eschatologiques (c’est-à-dire de la fin des temps). En fixant la venue de l’Époux au milieu de la nuit, St Matthieu fait de la parabole des dix vierges une « parabole pascale », et place en face de notre attente l’espérance d’une aube nouvelle, définitive, comme le dit le livre de l’Apocalypse : « Dans la ville, je n’ai pas vu de sanctuaire, car son sanctuaire, c’est le Seigneur Dieu, Souverain de l’univers, et l’Agneau. La ville n’a pas besoin du soleil ni de la lune pour l’éclairer, car la gloire de Dieu l’illumine : son luminaire, c’est l’Agneau. Les nations marcheront à sa lumière, et les rois de la terre y porteront leur gloire. Jour après jour, jamais les portes ne seront fermées, car il n’y aura plus de nuit. » (Ap 21, 22-25)

 

Bon et saint dimanche à tous !